Épisodes

  • Saison 4 - Un juge face au narcotrafic (6/6)
    Nov 19 2024

    Dans ce sixième et dernier épisode de la quatrième saison, Cartel Nord partage les confessions du juge Patrick Ardid, 67 ans qui tout vu, tout connu de la montée du narcotrafic à Marseille. Tour à tour juge des enfants, juge d’instruction, président de la 7e chambre correctionnelle et désormais magistrat honoraire, il a jugé certaines des affaires les plus emblématiques liées au trafic de stupéfiants à Marseille.

    Des premiers trafics à l’emprise des réseaux dans les cités, le juge Patrick Ardid a ainsi observé ce basculement et l’essor du trafic de stupéfiants. "Dans les années 80-90, jusqu’aux années 2000, on parlait essentiellement des drogues dures, l’héroïne en particulier, retrace-t-il. À côté, dans les cités, il y avait déjà plus ou moins des points avec des familles connues qui s’adonnaient au trafic de ce qu’on appelait des drogues douces et un micro trafic de stupéfiant s’est installé."

    Dans les années 2000, ce micro trafic, comme le définit Patrick Ardid, prend de plus en plus d’ampleur et les premières grosses affaires arrivent sur sa pile de dossiers au tribunal correctionnel de Marseille. En 2008, il y a notamment eu "l'affaire Corseus". "Au début des années 2000, le banditisme corse utilisait des hélicoptères pour transporter de grandes quantités de résine de cannabis depuis le Rif marocain jusqu'aux villages isolés près de Béziers, rappelle-t-il. La drogue était ensuite remise à des équipes de Seine-Saint-Denis (93) pour être acheminée vers la ville de Garges-Lès-Gonesse. Cette affaire hors normes illustrait les moyens considérables pour acheminer la drogue."

    En 2008, une autre affaire lui fait prendre conscience, cette fois-ci, de la structuration des réseaux de cité et des méthodes violentes utilisées pour la vente de stupéfiants. Il s'agit de "l'affaire des Iris", du nom de cette petite cité du 14e qu'il a jugé en 2012. Après un vol de produit stupéfiants sur le point de deal, un jeune homme s'est fait séquestrer et torturer dans un cave de la cité. Les cris de douleur du jeune homme ont résonné dans toute la cité et des habitants ont fini par appeler anonymement la police qui a réussi à extraire la victime, mais celle-ci est morte peu après à l'hôpital Laveran.

    Au tournant des années 2010, un autre phénomène prend de l’ampleur : c’est le début de l’ère des règlements de compte. Les réseaux se font la guerre et les morts s’enchaînent. Le public découvre alors la morbide réalité des trafics de stupéfiants. Des quartiers nord aux quartiers sud, la police judiciaire enchaîne les affaires et la justice se retrouve inondée de dossiers stup’.

    Le juge raconte alors comment la justice s'est adaptée pour absorber ce nouveau flux de dossiers stup'. Une évolution qui a conduit la 7e chambre du tribunal correctionnel de Marseille à juger la plupart de ces affaires "dont certaines auraient mérité de passer devant la cour d'assises". Conséquence directe : les peines de prison maximales encourues par les trafiquants passent de 30 à 10 ans.

    Patrick Ardid livre alors son réflexion sur cette évolution judiciaire, cette "correctionnalisation" n'est pas sans conséquence. Selon lui, cela limiterait "l'impact dissuasif de la justice sur l'action des trafiquants" et empêche "une dérégulation et déstabilisation du marché" efficace.

    Cartel Nord est un podcast en 5 saisons à découvrir sur laprovence.com et toutes les plateformes de streaming.

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    Cartel Nord est un podcast original La Provence.

    Écrit et raconté par : Eric Miguet et Jean-Guillaume Bayard.

    Habillage et mixage : Aurore Le Bihan et Sylvain Paley.

    Rédaction en chef : Aurélie Rossignol.

    Directeur de la rédaction : Aurélien Viers.

    Avec la participation du service Documentation.

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  • Saison 4 - L'heure du jugement (5/6)
    Nov 12 2024

    Dans ce cinquième épisode de la quatrième saison, Cartel Nord revient sur le moment tant attendu : le délibéré. À l'issue des débats, le doute persiste : est-ce que Nordine Achouri, le chef présumé du réseau de la Tour K, va être condamné par la justice ?

    Mercredi 7 octobre 2015, après trois années d’enquête, un an et demi d’instruction et trois semaines d’audience, c'est enfin l’heure du jugement pour les 28 prévenus. "Nous sommes dans un temps fort du procès parce que celui-ci est emblématique, parce que la presse l'a suivi et s’en est fait l'écho quotidiennement, contextualise Me Bruno Rebstock, l'un des trois avocats de Nordine Achouri. Pour le prononcé du jugement, il y a à nouveau beaucoup de presse, beaucoup de public et tous les avocats."

    L’enjeu pour les 28 prévenus est énorme car, si pour certains, la prison semble inéluctable, pour d’autres, la relaxe est envisageable. C’est notamment le cas pour Nordine Achouri. Désigné depuis le début de l’enquête comme le patron du réseau à la Castellane, le prévenu peut encore croire à son acquittement.

    La relaxe de Nordine Achouri serait un coup de théâtre judiciaire et un retournement de situation invraisemblable que redoute particulièrement la procureure Isabelle Candau. "Je me rappelle bien du délibéré, de l'angoisse qui monte et je me revois dire à mes collègues que, de toute façon, je vais avoir la relaxe de 'Nono' et que cela va être catastrophique", se souvient-elle.

    A 14h ce mercredi 7 octobre, la sonnerie du tribunal retentit, invitant le public, les avocats, les journalistes et la procureure à prendre place. La salle d’audience est pleine à craquer. La tension est à son comble. La juge Anne Tarelli et ses deux assesseures font leur entrer quelques instants après.

    Des nourrices aux guetteurs en passant par les vendeurs, la juge appelle un à un à la barre les 28 prévenus et annonce les premières peines. Elle prononce alors une relaxe totale et plusieurs relaxes partielles. Pour les autres prévenus, les peines sont plus sévères : jusqu’à deux ans de prison ferme pour l’une des nourrices et 6 ans pour l'un des principaux lieutenants du réseau.

    Vient ensuite le moment que tout le monde attend, l’annonce de la décision concernant Nordine Achouri.

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  • Saison 4 - Coup de tonnerre sur le procès (4/6)
    Nov 5 2024

    Dans ce quatrième épisode de la quatrième saison, Cartel Nord revient sur la dernière étape dans les débats à l'audience pour le réseau de la Tour K : les plaidoiries des avocats.

    Pour défendre les prévenus, qu'il soit simple guetteur, vendeur ou à un poste plus important dans le réseau, les robes noires adoptent toutes la même stratégie : leur client ne fait pas partie de la PME "Tour K". "Le but de la défense c’était de démontrer qu’il n’y avait pas d’organisation, que son propre client ne faisait pas partie d’une organisation et qu’il s’agissait d’un bout ici, un bout là mais qu’il n’y avait pas forcément une entreprise", avance maître Philippe Vouland, l’un des trois avocats de Nordine Achouri.

    Pendant trois jours, les plaidoiries s’enchaînent et le jeudi 1er octobre à 10h17, c’est au tour des avocats de Nordine Achouri de se présenter à la barre. Pour assurer sa défense, le principal prévenu du procès, accusé par la procureure d’être le patron du plus grand supermarché de la drogue de Marseille, a choisi de s’entourer de trois avocats, de trois ténors du barreau.

    Trois avocats, trois stratégies de défense vont donc se mettre en place pour tenter d’innocenter Nordine Achouri. Dans ce ballet à trois, chacun joue sa partition à l’image de Maître Keita, le premier des trois avocats à intervenir, qui axe sa plaidoirie sur la réalité sociale des quartiers Nord.

    Maître Bruno Rebstock est le deuxième à plaider. L'avocat décide d'attaquer frontalement le dossier et propose une autre lecture des éléments à charge contre son client. "Regardons, par exemple, au travers des écoutes téléphoniques et des surveillances, les hôtels que Nordine Achouri fréquente, assomme-t-il. Lorsqu'il séjourne à l'hôtel "Bonzaï" sur l'autoroute Nord, je me rappelle avoir plaidé que effectivement il pouvait s'offrir une autre vue que celle de l'autoroute et qu'il aurait pu regarder la mer et les yachts, par exemple. Regardons également les prostituées qu'il s'offre puisque c'est la réalité de ce dossier. Pour être clair, direct et concret dans le dossier, quand on échange au téléphone pour rencontrer 2 filles à 50€, je me dis quand même que pour quelqu'un qui est le bénéficiaire économique d'un trafic d'ampleur, il pouvait avoir, même sur cet aspect là, un standing un peu différent."

    Avec sa plaidoirie, l'avocat déstabilise la procureure Isabelle Candau. "Je me vois encore avoir le nœud à l'estomac et me dire 'Je pense qu'il va être relaxé', souffle-t-elle. Il ne me fait pas douter sur ce que moi je pense mais je me dis que cette version là peut passer parce qu'elle vaut peut être autant que la mienne."

    Enfin, le dernier avocat de Nordine Achouri à se présenter devant les juges est maître Philippe Vouland. Pour lui, Nordine Achouri ne peut tout simplement pas être le chef du réseau de la Tour K. "J’ai la conviction qu'il n'est pas le sommet de la pyramide et que des personnages, cités ou pas cités, n’ont pas été arrêtés ou inquiétés, assure-t-il. Nordine Achouri n’avait pas la compétence, les capacités, la force et la surface pour avoir 27 personnes minimum autour de lui et pour gérer les millions d'euros de bénéfice."

    D’après les trois avocats, le constat est simple : l’enquête n’a pas permis de prouver que Nordine Achouri est le chef du réseau de la Tour K. Au terme de leurs plaidoiries, ils demandent tous la relaxe. À 6 jours du délibéré, le suspense reste donc entier pour savoir si Nordine Achouri va être condamné.

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  • Saison 4 - Une procureure face au réseau (3/6)
    Oct 29 2024

    Dans ce troisième épisode de la quatrième saison, Cartel Nord raconte une nouvelle étape dans le procès de la Tour K. Après l'interrogatoire des 28 prévenus, place au réquisitoire de la procureure Isabelle Candau. Pendant près de 4 heures, la représentante du ministère public, celle qui mène l'accusation, expose l’incroyable organisation du réseau de trafic de drogue à la Castellane.

    "Qu'est-ce qui ressemble plus à un trafic de stupéfiants qu'un autre trafic de stupéfiants ? C'est un peu la question qui se pose à chaque audience." C'est par ces mots qu'elle débute ses réquisitions, le lundi 28 septembre 2015, à 08h50. En se basant sur les éléments rapportés par quatre années d’enquêtes, elle présente aux juges et au public son analyse du fonctionnement du réseau de la Tour K qu’elle compare aux grandes entreprises légales.

    À la lecture du dossier d’instruction, un élément lui saute rapidement aux yeux : les feuilles de compte sont la clé dans ce dossier. Les centaines de feuilles saisies lors du démantèlement de la Tour K lui permettent de véritablement comprendre l’organisation du trafic de drogue à la Castellane. "Je suis allé voir mon assistant spécialisé douanier et je lui ai donné tout ce qui avait été photographié et tout ce qu'on avait saisi, rapporte-t-elle. Il a réussi à décrypter un certain nombre de choses au travers de cette comptabilité, comme le détail des différents postes avec les rémunérations."

    Grâce à ce travail d'orfèvre, la procureure comprend qu’elle est face à une véritable PME du cannabis capable de générer plusieurs dizaines de millions d’euros par an. "Le chiffre d'affaires du réseau de la Tour K est de 1,950 millions d'euros par mois, ce qui donne un chiffre annuel de 23 400 000 €."

    La somme est considérable mais il reste à la procureure à démontrer comment les trafiquants parviennent à générer autant d’argent. Horaires de travail, planning, salaires, organigramme… Point par point, la procureure détaille le fonctionnement de cette entreprise du stup’.

    Dans la PME "Tour K", rien n’est laissé au hasard. Du guetteur au vendeur en passant aussi par le ravitailleur, chaque poste, chaque tâche correspond à une rémunération bien précise. "La plupart des nourrices font état d'un salaire compris entre 1 600 € et 2 000 €, les vendeurs font état d'un salaire d'environ 2 500 € par mois et le coursier 3 000 € par mois, a-t-elle détaillé dans son réquisitoire. À côté de ces salaires, il y a tout un système de primes, ce qu'ils appellent la défauche. Sur une journée moyenne, ils pouvaient rentrer 7 à 8 000 €, donc ils avaient des objectifs de vente et quand ils faisaient un très bon chiffre d'affaires journalier, ils recevaient une défauche dont le montant pouvait être soit un billet en plus du salaire journalier soit un morceau de cannabis."

    Au travers de son réquisitoire, ses arguments apparaissent claires et limpides : à la Castellane, la gestion du trafic est méthodique. Dans cette organisation, chacun occupe un poste bien précis, jusqu'au sommet de la pyramide où l'on retrouve le chef présumé du réseau, Nordine Achouri, assisté de son homme de main.

    Tous ces éléments, ce faisceau d’indices, permettent à la procureure de requérir contre le principal prévenu une peine de 9 ans de prison accompagnée d’une amende de 500 000 euros. De 20 mois d'emprisonnement pour les premières nourrices à 7 ans pour le principal lieutenant, derrière Nordine Achouri, la procureure requiert des peines en fonction de l’implication de chacun dans le réseau.

    Au terme des réquisitions, Isabelle Candau estime avoir fait la démonstration du degré de professionnalisme des narcotrafiquants à la Castellane. Après son réquisitoire, vient le temps des plaidoiries des avocats où l'une d'entres elle va faire vaciller la procureure et laisser planer le doute sur la possible relaxe de Nordine Achouri.

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  • Saison 4 - Le procès Achouri (2/6)
    Oct 22 2024

    Dans ce deuxième épisode de la quatrième saison, Cartel Nord revient sur l'interrogatoire que tout le monde attend, celui de Nordine Achouri. A mi-chemin du procès, jeudi 24 septembre, le chef présumé du réseau de la Tour K, âgé alors de 33 ans, fait plutôt bonne impression. "Il était tout propret, tout beau, quasiment en costume", se remémore Isabelle Candau, la procureure lors de ce procès.

    Dans le box des accusés, Nordine Achouri sait que son destin se joue maintenant. Au moment de prendre la parole, il prend toute la salle d'audience de court, à commencer par la présidente, Anne Tarelli. "Il a proposé, naturellement, de sortir du box, de venir à la barre pour avoir un micro où ils pourraient être entendus de tous. Il va ouvrir la gâchette du box et là, tout le monde est démuni", raconte-t-elle.

    Désormais seul au centre de la salle d’audience, seul face aux juges, Nordine Achouri est maintenant prêt à s’expliquer et à se défendre. Un bras de fer que le prévenu est prêt à engager car il le sait, dans ce dossier, il n’y a aucune preuve matérielle directe de son implication dans le trafic de drogue à la Castellane. "On avait pas de produit, pas un seul enregistrement ne pouvait être retenu à charge, on n'a pas eu de témoignage direct, pas d’empreinte ni sur les sacs ni sur les feuilles de compte et pas une écriture lui appartenant", rappelle l'un de ses trois avocats, maître Philippe Vouland.

    Face au manque de preuves et de témoignages, les juges disposent tout de même d’éléments à charge contre Nordine Achouri. Renseignements anonymes, séjours dans des hôtels de luxe, parts dans plusieurs sociétés, dettes dans plusieurs Casino, sans oublier une tentative d’assassinat et deux glocks retrouvés dans son congélateur : selon l’enquête, ces éléments dessinent en filigrane le portrait d’un chef de réseau.

    En face des juges, le prévenu ne faillit pas. Et, d’emblée, il pose le cadre : il n’est coupable de rien. "Je pense fortement que dans cette affaire, j’ai été victime de ma réputation. Mais j'ai confiance en la justice car, pour l'heure, je suis victime d'une machination", assure-t-il.

    Pendant toute la durée de son interrogatoire, Nordine Achouri garde la même ligne de conduite et trouve la parade contre chacune des accusations. Son aisance naturelle lui permet même d’endosser un autre rôle, celui de porte-parole des quartiers nord. "Tous ces jeunes, sur le banc des prévenus, regardez-les !, lance-t-il. Il faut parler de ce que nous vivons dans les cités ! (...) Enlever un réseau, deux réseaux, trois réseaux, tous les réseaux de la Castellane, c’est très bien. Mais les petits jeunes, il faut pas les laisser comme des Gremlins, il faut trouver une solution !"

    Pendant près de deux heures, Nordine Achouri conteste ainsi fermement son rôle présumé de trafiquant de drogue. Mais pour la procureure Isabelle Candau, il n’y a aucun doute : il est bien le patron du réseau de la Tour K, une organisation criminelle capable de générer plusieurs dizaines de millions d’euros de chiffres d’affaires par an. Dans son réquisitoire, la procureure va ainsi démonter l’argumentaire du principal prévenu et détailler au grand jour la réalité du fonctionnement du plus grand supermarché de la drogue de Marseille.

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  • Saison 4 - Le procès de la peur (1/6)
    Oct 15 2024

    Dans ce premier épisode de la quatrième saison, Cartel Nord raconte l'ouverture du procès du réseau de la Tour K. Le 16 septembre 2015, après 4 ans d'enquête, enfin, les 28 prévenus du plus grand supermarché de la drogue de la région marseillaise sont appelés à comparaître devant la 7e chambre du tribunal correctionnel du tribunal correctionnel de Grande Instance de Marseille.

    Juste avant le début de l'audience, vers 8h du matin, c'est l'effervescence dans la salle des pas perdus du tribunal. "Il y avait beaucoup de presse, se rappelle Isabelle Candau, la procureure lors de ce procès. En plus de la presse locale, il y avait la presse nationale. Ce n'est pas habituel et cela rajoute de la pression et de la tension". Aux journalistes s'ajoutent la trentaine d'avocats et le public, le tout créant "une agitation certaine dans les premières heures de ce premier jour de ce procès", comme le relève Bruno Rebstock, l'un des trois avocats de Nordine Achouri.

    Peu après, la sonnerie du tribunal retentit. Pour la première fois, le visage de celles et ceux impliqués dans le plus grand trafic de stupéfiants de Marseille apparaît au public. La présidente Anne Tarelli, accompagnée de ses deux assesseurs, prend ensuite la parole et commence commence par la lecture du dossier et le rappel des charges. Des petites mains du trafic au chef du réseau, la présidente décide ensuite d’appeler les prévenus à la barre en fonction de leur place hiérarchique dans le trafic, avec pour point de départ les nourrices, ces habitants de la cité de la Castellane en charge du stockage de la drogue, des armes et de l’argent.

    Pendant deux jours, les sept nourrices défilent à la barre et exposent sans détour leur trajectoire personnelle pour justifier leur participation au trafic. Outre le rôle dans le trafic de drogue à la Tour K, ces sept prévenus sont également interrogés sur les autres membres du réseau. Leurs témoignages pourraient bouleverser le déroulé du procès et faire tomber le château de carte du trafic de drogue à la Castellane.

    Face aux juges, les nourrices feignent de ne pas savoir et de ne pas connaître l’identité des autres membres du réseau. "Les personnes qui sont venues me démarcher n’étaient pas masquées, répondra l'une d'entre elles lors de son interrogatoire durant l'audience. Je ne les ai pas revus depuis. Ce n’était pas des gens de la Castellane. Je n’ai pas entendu comment ils s’appelaient. Vous me demandez qui je connais parmi les prévenus : j’en connais certains de vue mais je ne connais pas leur prénom."

    Guetteurs, vendeurs, ravitailleurs… Après les nourrices, les autres petites mains du réseau adoptent la même stratégie, celle de l'omerta. Un refus de parler justifié par la crainte d’éventuelles représailles mais également par stratégie de défense. "Dans un procès, ce n'est pas à vous de démontrer votre innocence, rappelle ainsi Pascal Luongo, l'avocat de l'une des nourrices. Et, donc, le fait de ne pas parler, c'est aussi une manière de se défendre."

    A la 7e chambre, les jours se suivent et se ressemblent. Le procès du siècle se transforme en procès de la peur. Mais au 9e jour d'audience, à mi-chemin du procès, un prévenu va pour la première fois briser ce silence. Le jeudi 24 septembre 2015, Nordine Achouri, le chef présumé du réseau, ce présente ce jour-là devant les juges.

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  • Saison 3 - Une juge face au réseau de la Tour K (6/6)
    Jul 9 2024

    Dans ce sixième épisode de la troisième saison, Cartel Nord revient sur la dernière phase des investigations sur le réseau de la Tour K dans la cité de la Castellane (16e). Après l'enquête policière, débutée en avril 2012, et l'"Opération château" du 17 juin 2013, s'ouvre l'information judiciaire, l'ultime étape menée par la juge d'instruction pour recoller les dernières pièces du puzzle avant le procès.

    Le 17 juin 2013, quelques heures après l'arrestation de 23 membres présumés du réseau de trafic de drogue, les gardes-à-vue s'enchaînent dans les bureaux de la police judiciaire. Un à un, les interpellés défilent devant les enquêteurs mais tous gardent la même ligne de conduite et ne lâchent rien sur leur rôle dans le trafic.

    Après ces quatre jours d'interrogatoires, s'ouvre donc un nouveau temps judiciaire, plus long, plus pointu : l'information judiciaire. Dans cette ultime étape avant le procès, la juge d’instruction peut s’appuyer sur de nouveaux éléments par rapport à l’enquête policière. "J'ai notamment les empreintes digitales et génétiques sur les objets saisis en perquisition", précise la juge d'instruction, Karine Sabourin.

    Dans ce puzzle en construction, un élément clé va bouleverser l’enquête judiciaire. Au cours des perquisitions du 17 juin 2013, les policiers ont mis la main sur près de 800 feuilles de compte qui détaillent avec précision toute l’organisation du trafic, de l’achat de la simple canette de Coca-Cola à la réception de sacs remplis de centaines de kilos de cannabis. "C'était une mine d'or en terme d'exploitation et nous avons fait appel à des experts comptables de Paris pour les analyser", poursuit le commissaire divisionnaire Sébastien Lautard.

    Ces informations clés permettent ainsi à la juge d'instruction de recouper les informations obtenues par les policiers durant leurs surveillances, écoutes et autres filatures. Tandis que le puzzle de l'organisation du réseau se met en place, la juge confronte à tour de rôle les membres présumés du réseau sur les éléments à charge contre eux.

    Fin 2013, justement, un face-à-face avec un membre du réseau permet à la juge d’obtenir un témoignage clé sur l’organisation du trafic. "C'était une vraie pipelette, se souvient Karine Sabourin. Il ne s'est pas épanché sur les autres mais il a bien expliqué l'organisation du trafic qui était conforme aux écoutes et à la comptabilité analysée à partir des feuilles de compte."

    Mis bout à bout, toutes ces auditions, tous ces nouveaux éléments, permettent à la juge d'instruction de compléter le puzzle de l’enquête judiciaire sur le réseau de la Tour K. En mai 2015, soit moins de deux ans après le début de l’information judiciaire, Karine Sabourin parvient à boucler le dossier.

    Au total, 28 personnes sont renvoyées devant le tribunal correctionnel, soupçonnés d’être les principaux membres du plus grand supermarché de la drogue de la région marseillaise. Quelques mois plus tard, en octobre 2015, s'ouvre alors le procès de la Tour K. Il s'agit du premier grand procès sur le trafic de stupéfiants à Marseille. Une audience de 3 semaines à découvrir prochainement dans la quatrième saison de Cartel Nord.

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    Stagiaires : Baya Drissi et Camille Micaelli.

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  • Saison 3 - La chute de "Nono", le boss de la Tour K (5/6)
    Jul 2 2024

    Dans ce cinquième épisode de la troisième saison, Cartel Nord revient sur la traque de Nordine Achouri, la tête de réseau présumée du réseau de trafic de drogue de la Tour K.

    Le 22 novembre 2012, les enquêteurs reçoivent un renseignement anonyme qui désigne celui que l'on surnomme "Nono", 31 ans, comme le boss du plus grand supermarché de la drogue de Marseille. La police judiciaire met tous les moyens pour obtenir les preuves matérielles de son rôle de chef du réseau de la Tour K.

    Mais après plusieurs semaines de traque, les policiers se heurtent à un mur. Les écoutes, les filatures, les surveillances... Rien ne permet de raccrocher Nordine Achouri au trafic en place à la cité de La Castellane (16e). "Il a tout délégué à des lieutenants et ce sont eux qui ont les mains dans le cambouis", résume le commissaire divisionnaire Sébastien Lautard.

    Début janvier 2013, face au manque de preuve directe et concrète, les policiers décident de changer de braquet et d'adopter une nouvelle stratégie d'enquête. L’objectif est de récolter des éléments indirects permettant de relier Nordine Achouri au réseau de la Tour K. Les écoutes de ses lieutenants et de ses hommes de confiance se révèlent plus fructueuses et donnent des premiers résultats aux enquêteurs.

    Une autre technique d'enquête va s'avérer plus efficace : suivre les mouvements financiers du trafiquant, en collaboration avec le GIR Paca, le Groupement interministériel de recherche.

    Après plusieurs mois d’investigation, la stratégie se révèle payante. Le GIR Paca conclut sans détour que Nordine Achouri a un train de vie disproportionné par rapport à ses revenus. Séjours dans des palaces, virés dans les prestigieux Casinos du Sud-Est et location de voitures de luxe : sans emploi déclaré depuis 2002 et officiellement domicilié chez ses parents, Nordine Achouri mène la vie d’un millionnaire.

    Le 10 avril 2013, un événement inattendu bouleverse l’enquête. Nordine Achouri échappe à une tentative de règlement de compte. Pour les enquêteurs, il faut agir et l’arrêter avant qu'il ne leur échappe.

    Le 17 juin 2013, lors de l’opération château, Nordine Achouri fait partie de la vingtaine de membres du réseau interpellés par la police judiciaire. Une nouvelle page de l’enquête s’ouvre alors. C’est la phase de l’instruction, celle qui permettra, ou non, de confirmer l’implication de Nordine Achouri et des autres prévenus dans le réseau de la Tour K.

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    16 min