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Georges Perec, le langage comme terrain de jeu

Georges Perec, le langage comme terrain de jeu
L'art et la manière d'aborder son chef de service pour lui demander une augmentation

Une enfance orpheline

Georges Peretz, dit Georges Perec, est né le 7 mars 1936 à Paris, année du premier gouvernement socialiste en France. Car oui, les événements historiques ont une influence considérable sur la vie de cet écrivain, d’origine juive et polonaise, et orphelin de ses deux parents, Icek et Cyrla.

En effet, son père meurt au front en 1940, alors que sa mère est arrêtée puis déportée à Auschwitz en 1943. L’année précédente, elle avait envoyé le petit Georges à Villars-de-Lans, non loin de Grenoble, dans le but de se sauver des Nazis. C’est là que son patronyme est francisé, passant de Peretz à Perec.

En 1945, Georges Perec retourne vivre à Paris auprès d’une tante paternelle, et mènera sa scolarité dans la région jusqu’à des études de lettres. En parallèle, en 1949, Perec suit une psychothérapie avec Françoise Dolto, qui sera la première des trois qu’il suivra au cours de sa vie.

L’importance de ces psychanalyses se vérifiera dans toute l’œuvre de l’écrivain, puisque parmi ses grands thèmes de prédilection, figureront l’identité, la mémoire, et la quête de soi.

Je me souviens

Les Choses, son premier roman

Lors de ses études de lettres, Georges Perec rencontre Marcel Bénabou, et devient documentaliste au CNRS. Mais il est porté par l’envie de se consacrer à l’écriture, qui ne le quitte pas depuis des années. En parallèle, il travaille à un projet de revue littéraire, il écrit plusieurs romans, tous refusés par les éditeurs, jusqu’à l’année 1965. Cette année, il publie son premier roman, Les Choses.

Avec pour sous-titre original "Une histoire des années soixante", Les Choses est un texte clairement influencé par Flaubert et L’Éducation sentimentale. Il s’agit là d’un roman sociologique, réaliste, dont l’histoire prend pour départ un couple à l’envie frénétique de posséder des objets pour être heureux.

Le livre est un véritable succès, et se voit même récompensé par le Prix Renaudot. La carrière de Georges Perec se poursuit par la publication de textes comme Quel petit vélo à guidon chromé au fond de la cour ? en 1966, ou Un homme qui dort en 1967 (porté à l’écran en 1975). Auteur radiophonique, scénariste pour la télévision, auteur de feuilletons littéraires, Georges Perec est un touche à tout prolifique, dont l’outil principal est sa plume, pleine d'inventivité.

On le voit déjà, le travail de la langue et les inventions linguistiques rythment les créations littéraires de l’auteur, qui articule également son œuvre autour de quêtes identitaires, probablement liées à son histoire. Et en 1967, Perec fait son entrée à l’Oulipo.

Les Choses

Un membre actif de l’Oulipo

L’OuLiPo (ou Oulipo) est l’acronyme pour désigner l’Ouvroir de littérature potentielle, dont Perec fait désormais partie. Il s’agit d’un groupe de littérature porté par la notion d’inventivité linguistique, et dont l’enjeu est d’explorer les potentialités du langage. Tout ceci se fait au moyen de jeux d’écriture, ou encore de contraintes littéraires et/ou mathématiques, que les œuvres de Perec illustrent à merveille.

En effet, à partir de ce moment, il sera poussé à inventer des procédés d’écritures originaux, comme l’illustre La Disparition en 1969. Ce roman est un texte de 300 pages entièrement écrit sans la lettre “e” (un lipogramme), mettant en scène la disparition d’un certain Anton Voyl. En 1972, l’inverse se produit avec Les Revenentes, puisqu’il écrit son texte avec une seule voyelle, quitte à faire des fautes d’orthographes : la lettre “E”. Rien de plus oulipien !

Il n’en reste pas moins que les textes de Perec restent marqués par une très forte oralité, que les jeux langagiers viennent parfois renforcer. C’est la raison pour laquelle le (re)découvrir en livre audio est particulièrement intéressant !

En 1975, il publie W ou le souvenir d’enfance, dont le nom est inspiré par son séjour dans diverses pensions de Villard-de-Lans. Il s’agit en partie d’un récit d’une enfance pendant la guerre. Parmi les clés de lecture, la mort des parents de l’auteur est un indice de compréhension, puisqu’il s’agit, en réalité, d’un récit autobiographique. Une nouvelle fois, ce texte participe à renforcer l’un des points d’ancrages thématiques de Perec : la quête de soi.

Dès 1976, Georges Perec est verbicruciste. Chaque semaine, il créé une grille de mots croisés pour le magazine “Le Point”. Un élément supplémentaire à sa grande carrière d’oulipien !

Ni un mouvement littéraire, ni un séminaire scientifique, ni de la littérature aléatoire, l’Oulipo se définit donc selon Raymond Queneau (l'un des créateurs du groupe), d’abord par ce qu’elle n’est pas, et Georges Perec en est un parfait ambassadeur.

En 1978, il reçoit le prix Médicis pour La Vie mode d’emploi, probablement son roman le plus ambitieux. Dans ce livre, il construit une succession de petites histoires, qu’il articule ensemble en y ajoutant des contraintes. Un goût pour la langue et pour les histoires qui nous ravissent encore aujourd’hui !

Car oui, Georges Perec fait désormais partie de nos grands auteurs, puisqu’en 2017, il entre dans “La Pléiade” !

Il s’éteint à Ivry-sur-Seine le 3 mars 1982 d’un cancer des bronches, et restera oulipien pour toujours car, comme le veut la formule, même après leur mort, un oulipien est “excusé pour cause de décès”.

Zazie dans le métro

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