Une jeunesse brillante
Toni Morrison, née Chloe Ardelia Wofford Morrison, est née en 1931 dans l’Ohio. Elle grandit au sein d’une famille ouvrière de quatre enfants, dont les parents ont déménagé à de nombreuses reprises pour fuir le racisme ambiant d’autres États américains. Ce racisme-là, la petite Toni ne le connaît pas, mais apprend à côtoyer le communautarisme, et expérimentera la violence du monde en quittant sa ville.
Les enfants Morrison sont très vite influencés par leurs parents à faire des études, à lire, et à développer leur curiosité, ce qui conduit Toni Morrison à être la seule de sa classe à savoir lire. À l’âge de douze ans, elle se convertit au catholicisme, et prend pour nom de baptême Antony. C’est de là que son nom d’autrice provient aujourd’hui.
En 1949, Toni Morrison poursuit ses études de littérature dans l’une des plus prestigieuses Universités afro-américaines : l’Université Howard. Elle intègre ensuite l’Université Cornell, où elle soutient en 1955 son Master of Arts sur le thème du suicide chez William Faulkner et Virginia Woolf (“Virginia Woolf’s and William Faulkner’s Treatment of the Alienated”).
Puis, très naturellement, elle devient professeure dans le Texas, ainsi qu'à Howard. S’ensuivent alors différents postes, jusqu’à atteindre l’Université de Princeton, qui sera le dernier établissement qu’elle fréquentera avant sa retraite en 2006.
Une entrée remarquée dans le milieu littéraire
Alors qu’elle était mariée depuis 1958 à Howard Morrison, en 1964, elle divorce, et se lance dans le milieu de l’édition chez Random House. En 1967, elle devient directrice d’édition, chargée de la littérature noire.
Sa carrière d’écrivaine commence au sein d’un groupe de poètes et d’écrivains de l’Université Howard. Lors d’une séance, la jeune femme découvre une nouvelle décryptant l'histoire d’une fille noire, dont l’objectif est d’avoir les yeux bleus. Quelques années plus tard, paraît The Bluest Eye (L’Oeil le plus bleu), son premier roman. Toni Morrison s’inflige une discipline de vie sévère, entre écriture et vie de maman. Le livre connaît un très beau succès critique, et attire l’attention de Robert Gittlieb, qui deviendra l'éditeur de presque tous ses romans par la suite. Elle sortira notamment le roman Le Chant du Salomon.
L’écriture est si présente dans la vie de Toni Morrison qu’en 1983, elle quitte l’édition et son métier d’éditrice pour se consacrer majoritairement à ses manuscrits. Elle publie différents romans, tels que Sula, La chanson de Salomon, et même une pièce de théâtre, Dreaming Emmett. Et c’est en 1987 que sa carrière littéraire va prendre un nouveau tournant.
La reconnaissance internationale
En effet, en 1987, Toni Morrison publie ce qui deviendra son roman le plus connu : Beloved. Inspiré par la vie d’une femme noire esclave afro-américaine poursuivie par des chasseurs d’esclaves, et ayant été contrainte de tuer son enfant pour la liberté, ce livre, tiré d’une histoire vraie d’une ancienne esclave, est le premier tome d’une trilogie (avec Jazz et Paradis). Véritable succès commercial et critique, Beloved va valoir à son autrice le prestigieux Prix Pulitzer en 1988.
Quelques années plus tard, en 1993, Toni Morrison reçoit le Prix Nobel de littérature, pour “ses romans caractérisés par une force visionnaire et une portée poétique, qui donne vie à un aspect essentiel de la réalité américaine”. Véritable consécration mondiale pour un auteur, cette distinction confirme le statut de l’écrivaine, qui est nommée, en 2005, docteur honoris causa en arts et littérature à l’Université d’Oxford.
Les récompenses se multiplient, ses œuvres sont adaptées sur différents supports, et donnent à voir l’une des plus éminentes autrices de la littérature afro-américaine, mais aussi de la littérature mondiale.
En parallèle, Toni Morrison se lance dans la littérature pour enfant, mais aussi dans la direction du magazine The Nation, ou encore dans la critique littéraire. Une palette de talents qui contribue à porter la voix de Toni Morrison haut dans le monde de la culture.
Forte de son influence, elle n’hésite pas à apporter son soutien public à Barack Obama lors des élections présidentielles de 2008 et de 2012. Ce dernier la décorera de la Médaille de la Liberté en 2012.
En août 2019, Toni Morrison succombe à une pneumonie. Le monde entier, de New York à Paris, témoigne alors de son émotion pour cette autrice et pour cette femme, à la fois porteuse d’une voix nouvelle, et témoin de celles des autres.
Crédit photo : Deborah Feingold
