###Les prémices d’une carrière atypique
Né en 10 mars 1920 à Ville d’Avray, Boris Vian naît au sein d’une famille de quatre enfants, où l’ambiance est joyeuse, et où la culture a une place à part. Très vite, il souffre de problèmes de santé, et reçoit les cours à domicile grâce à une institutrice particulière. C’est de cette manière qu’il maîtrise très rapidement la lecture, mais aussi l’écriture.
Progressivement, il connaîtra d’autres problèmes de santé, jamais sans mener des études brillantes. En effet, à 15 ans puis à 17 ans, il passe deux bacs différents, et apprend même l’anglais seul. Un vrai touche-à-tout !
Boris Vian était donc un élève doué, passionné par les mots, mais aussi par la musique. C’est ainsi que dès ses 16 ans, il se penche davantage sur le jazz, qui n’était pas aussi démocratisé qu’aujourd’hui en France. Peu à peu, il devient un membre du “Hot Club de France”, et débute l’instrument qui le rendra vite célèbre : la trompette.
En 1942, il ressort de l’École Centrale des Arts et Manufactures d’Angoulême avec un diplôme d’ingénieur, alors même qu’il avait évité la mobilisation en 1939 pour des raisons de santé que l’on connaît. Un parcours prolifique, mais surtout atypique, puisque Vian se dirige davantage vers l’écriture. Peu à peu, il rédigera donc ses premiers textes et chansons, sous des pseudonymes comme Bison Ravi (l’anagramme de Boris Vian) ou encore Hugo Hochebuisson. Ce qui nous donnera des textes aussi variés que passionnants, à l’instar de sa carrière !
Une œuvre prolifique
En 1946, Vian publie son célèbre ouvrage L’Écume des jours dans un contexte un peu particulier, sur lequel on reviendra. C’est à partir de cette année qu’il rencontre le mythique couple Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir, dans le Saint-Germain-des-Prés foisonnant de l’époque.
Rapidement, son style, parodiant le roman noir américain, se précise. Avec J’irais cracher sur vos tombes, publié sous pseudonyme (Vernon Sullivan), Boris Vian fait scandale, et annonce à merveille cette œuvre foisonnante dont on continue à découvrir des manuscrits, encore aujourd’hui !
Par la suite, ses publications ne connaissent pas le succès escompté, et Vian, séparé de sa femme Michelle, songe sérieusement à arrêter la littérature. C’est aussi à cette époque que le jazz s’installe progressivement dans la capitale. Il s’engouffre naturellement dans la brèche, et monte, en 1947, La petite chorale de Saint-Germain-des-Pieds (avec l’humour qu’on lui connaît !), et devient un acteur notable du Tabou, une petite boîte de jazz du quartier. Mais il doit très vite arrêter la trompette en raison de sa santé fragile. C’est de cette manière qu’il participera à sa manière à la vie musicale. Il publiera de nombreux articles pour des revues de jazz, et écrira peu à peu des spectacles de cabaret. Quand on vous disait que son œuvre est prolifique !
En 1949, Vian ne s’arrête pas là, et écrit son premier succès musical pour Henri Salvador, C'est le be-bop. Par la suite, s’enchaîneront les succès comme, en 1954, le Déserteur, célèbre manifeste antimilitariste. Tout ceci se mène de front, en parallèle de l’écriture de pièces de théâtre ou de traductions littéraires. Dans cette perspective, son œuvre est une mine d’or, dans laquelle on plonge à corps perdu sans jamais s’ennuyer.
Cet adepte d’Alfred Jarry a naturellement adhéré au Collège de Pataphysique, étudiant la science du virtuel et des solutions imaginaires. Une curiosité qui laisse penser qu’elle ne s’épuisera jamais. Mais en 1959, à l’occasion d’une projection privée du film J’irais cracher sur vos tombes, Boris Vian meurt à 39 ans, laissant derrière lui cette œuvre que l’on connaît et reconnaît encore aujourd’hui. Acteur, peintre, ingénieur, écrivain, trompettiste, scénariste, traducteur, il a laissé derrière lui des titres phares, dont L’écume des jours, qui est rapidement devenu une œuvre classique.
On l’aura compris, en 1947, la publication de L’écume des jours n’aura pas connu le succès escompté à l’époque. Malgré un plébiscite par Raymond Queneau ou de Jean-Paul Sartre, cet ouvrage ne deviendra culte qu’après la mort de Vian, et est désormais classé dans le top 10 des meilleurs livres de XXème siècle. Raymond Queneau le qualifiera même du “plus poignant des romans d’amour contemporains”.
Et en effet, c’est bien d’une histoire d’amour dont il s’agit ! Une romance tragique entre Colin et Chloé, interrompue par la maladie de cette dernière, dont les poumons sont écrasés par un nénuphar dans la poitrine. Bien évidemment, Boris Vian y glisse là son histoire personnelle, souffrant depuis tout petit de problèmes cardiaques.
Mais si l’histoire de ce livre, désormais lu par tous les adolescents, est culte, c’est aussi en raison de son contexte particulier. En effet, en 1946 était décerné le prix de la Pléiade, que l’auteur désirait plus que tout. Ce prix visait principalement à mettre en valeur un auteur débutant, révélant ainsi des écrivains comme Jean Genet ou Mouloudji. Toutefois, le manuscrit de "L’écume des jours” ne l’obtient pas, laissant Boris Vian seul avec sa déception. Ce n’est que dans les années 1960, bien après la mort de son auteur, que le livre est reconnu, se hissant peu à peu au rang de classique de la littérature française. Et comme une revanche posthume, “L’écume des jours” est même entrée à la Pléiade en 2010 !
Depuis, bon nombre d’adaptations ont été faite, tant au théâtre, qu’en bande-dessinée, mais aussi au cinéma. Les deux principales resteront celle de Charles Belmont en 1968, et de Michel Gondry, en 2013. Une œuvre clé dans la carrière de l’auteur, et capitale pour bon nombre d’entre nous !
Il n’en reste pas moins que Boris Vian est aujourd’hui un auteur majeur du patrimoine français. Avec une œuvre pleine de poésie, d’éclectisme, et d’inventions littéraires, il nous a montré que l’écriture était d’abord une affaire de temps, avant d’être une affaire d’époque !
Un titre léger et lumineux qui annonce une histoire d'amour drôle ou grinçante, tendre ou grave, fascinante et inoubliable, composée par un écrivain de vingt-six ans. C'est un conte de l'époque de la découverte du jazz et de la science-fiction, à la fois comique et tragique, féerique et déchirant. Dans cette œuvre d'une modernité insolente, livre culte depuis plus de quarante ans, la mort prend la forme d'un nénuphar. Seules deux choses demeurent éternelles et triomphantes : le bonheur ineffable de l'amour absolu et la musique des Noirs américains...